MONOGRAPHIE RÉDIGÉE PAR L'INSTITUTRICE DU VILLAGE

 

A la lecture, vous constaterez que la rédaction de cette monographie semble répondre à une sorte de questionnaire. Ceci m'a intrigué et j'ai trouvé la réponse sur internet. Il semblerait à l'origine qu'elles répondent à un besoin local de connaître l'histoire des villages et la géographie. Besoin semble-t-il repris par les autorités académiques puis ensuite par le Ministère. Les monographies se développent dans les années 1883 à 1889 à l'occasion de participations à des concours ou d'expositions scolaires, puis figurent à l'Exposition Universelle de 1889 à Paris. On montre ainsi les progrès de l'Instruction Publique ainsi que l'efficacité de ses Institutrices et Instituteurs dans l'enseignement de l'Histoire Géographie. La Haute-Garonne a vu la réalisation de 530 monographies pour 588 communes et fait figure de département précurseur en la matière. Pour en savoir plus sur le sujet : http://pagesperso-orange.fr/delbrayelle/monographies_des_instituteurs.htm

 

    La Salvetat Saint-Gilles, petite commune du canton de Léguevin dans le département de la Haute-Garonne, est située entre le 1er et le 2ème degré de longitude occidentale et le 44ème et le 43ème degré de latitude septentrionale.

    Située au sud-ouest de Toulouse, chef lieu d'arrondissement et de département, elle en est distante de seize kilomètres et n'a point de limites naturelles mais seulement de convention.

    Elle est bornée au Nord et au Nord-Ouest par la commune proprement dite de Léguevin, au Sud par celle de Fontenilles, au Sud encore ou Sud-est par Plaisance du Touch, son étendue est de 575 hectares et sa distance au canton de 5 kilomètres.

 

DESCRIPTION PHYSIQUE DU PAYS

I

     La campagne de La Salvetat offre aux regards du voyageur un aspect riche, productif et agréable. Le sol est accidenté. De petites collines entrecoupées de bois et de prairies, le tout serpenté par un petit ruisseau l'Aussonnelle qui arrose la commune du Sud au Nord. Un bon nombre de ponts en bon état permettent de loin en loin de traverser d'une rive à l'autre. Les crues sont très rares et ne sont dues qu'à des orages.

    Un nombre considérable de sources fournissant une excellente eau, se trouvent dans la commune bien qu'elle soit sur une hauteur.

    En raison de cette situation, l'air est vif et pur, la température bonne, la salubrité excellente, les gens vigoureux et robustes.

    Les vents y sont rares. Le principal est le vent d'autan qui se fait sentir avec sa violence habituelle.

II

    La population en 1881 était de 292 habitants et aujourd'hui ce chiffre est arrivé à 310 ; cet accroissement si considérable pour un si petit endroit est dû à la richesse du sol et à la plantation de la vigne qui s'étend de plus en plus et nécessite un plus grand nombre d'ouvriers, lesquels viennent s'installer avec leurs familles.

    A La Salvetat se trouvent la mairie et l'école, l'église, le presbytère et bon nombre d'artisans vu le peu d'importance de la localité ; ainsi on y trouve des charrons, des forgerons, un mécanicien, un maçon, etc...

    La Salvetat possède un moulin à vent, un café, une épicerie, un boulanger mais là se bornent ses ressources, un boucher vient chaque semaine porter de Plaisance les provisions de gras.

    Pour les premières nécessités de la vie il faut avoir recours aux communes des environs. Les médecins sont aussi soit au chef-lieu de canton soit  à Plaisance.

    Le hameau des Barraques est situé au couchant de la Salvetat et il est séparé du village  par l'Aussonnelle. Quoique à peu de distance la température y est bien moins douce et tandis que les habitants de la Salvetat jouissent d'une atmosphère tempérée ceux des Barraques ont en partage un froid.?????.et l'humidité.

    La population de La Salvetat est de 206 habitants sur le plateau formant 65 feux et celle du hameau de 104 avec 30 feux.

    Cette petite commune est administrée par un maire, un adjoint, dix conseillers ; elle est aussi pourvue d'une école dirigée par une institutrice ; pour les cultes, elle est desservie par le curé de l'endroit ; pour les finances par le percepteur du canton. Quant aux postes, le courrier  porté par le facteur arrive chaque matin de Plaisance du Touch.

    La valeur du centime est de 21,26

III

    La principale  production de la commune de La Salvetat est la vigne ; on y récolte aussi des céréales, du foin mais en peu d'abondance.

    La quantité ordinaire de la récolte en vin annuellement est de 2000 hectolitres.

    Le procédé pour la culture est le même que dans tout le midi.

    Les bois épars dans la commune de La Salvetat sont au nombre de huit et tendent tous à disparaître pour faire place à la vigne car le phylloxera n'a pas encore paru ou n'a fait qu'une tache insignifiante.

    La surveillance forestière est confiée au garde-champêtre.

    Il y a des animaux de toute sorte tels que chevaux, mulets, boeuf, biches, en retour le pays est peu giboyeux et le poisson rare.

    Donc les produits de cette petite commune se résument ainsi : vin, blé, avoine, fourrage.


 

 

   

    Sous le rapport des communications La Salvetat ne possède qu'une route communale allant de Plaisance du Touch au chef-lieu de canton et encore ne la possède-t-elle pas depuis longtemps.

    Les moyens de transports sont nuls car pour aller  à Toulouse il faut prendre la diligence ou un omnibus à Plaisance ou bien encore faire cinq ou six kilomètres pour aller prendre le train à Pibrac.

    Le commerce local est nul puisqu'il n'y a ni foires, ni marchés et les approvisionnements se font au chef-lieu de canton ou au chef-lieu de département.

 

IV

    La commune de La Salvetat  ne possède aucune archive qui puisse renseigner sur l'étymologie de son nom.

    Au dire de plusieurs anciens, vers l'an 1600, une épidémie ayant éclatée à Toulouse, le Parlement se transporta à La Salvetat Saint-Gilles et y résida jusqu'à la fin du fléau.

    C'est tout ce qu'on sait de certain, tout le reste, comme la légende du château est dans les ténèbres et personne n'a entendu parler de la date approximative de sa construction. Selon toute apparence il daterait du 13e ou 14e siècle.

    Sous le rapport des moeurs, il est peu de petits endroits aussi bien favorisés que celui-ci. Les habitants sont vifs, emportés même mais de même, la bonne humeur reprend vite le dessus.

    La religion est essentiellement catholique et les exercices religieux régulièrement suivis. La moindre petite fête trouve les habitants réunis à l'église ; ils abandonnent volontiers leurs occupations journalières pour aller où leurs croyances les appellent. Malgré cela un peu de superstition se mêle à leur foi : ils croient facilement aux revenants, aux esprits, ils vont consulter le devin dès que leur enfant ou leurs bestiaux sont malades.

    Le costume est généralement riche surtout chez les femmes et les jeunes filles. Le luxe, comme  partout, a fait de rapides progrès sans cependant altérer le goût du travail.

    Quant aux hommes, ils portent  presque tous la blouse traditionnelle ; la principale coiffure est la casquette, et la chaussure varie selon le temps sec ou humide les sandales ou les sabots ; les souliers sont  pour les grands jours de fête ou ne se mettent que lorsqu'il faut aller à une foire ou un marché.

    Le patois est la langue la plus répandue; et pour exprimer la même idée il y a plusieurs expressions qui font comprendre facilement  le degré d'importance qu'on ajoute  à ce qu'on dit.

    L'alimentation est presque composée de légumes, de salé, de lard ; quant à la volaille on n'en mange que rarement car on préfère l'échanger contre quelques pièces blanches lesquelles, à leur tour, deviennent ce que la fantaisie ou le besoin du propriétaire désire.

    Le caractère du paysan de La Salvetat est généreux ; quelqu'un va-t-il chez lui, vite  une table est dressée, un goûter  plus ou moins rustique est servi et il faut toujours boire à la santé de l'un ou de l'autre sans oublier les absents.

    Rencontre-t-il quelqu'un sur son passage, il le salue se découvrant et en ajoutant à son bonjour une adresse qui souvent a pour objet un être invisible  (L'Ange Gardien)

ANNEXE AU TITRE IV

    L'École de La Salvetat existant depuis la fin du siècle dernier n'a eu qu'un seul instituteur ; elle est dirigée par une inspectrice.

    Secondée par les parents, qui tiennent aux progrès de leurs enfants, la tâche, quoique lourde, devient facile et agréable.

    Le nombre des enfants inscrits est de 37 pour le moment. La fréquentation est satisfaisante ; à part des cas exceptionnels comme maladies, voyages ou travaux des champs, il n'y a que de rares absences ; les parents sont exacts à envoyer leurs enfants et ceux-ci sont ponctuels aux heures réglementaires.

    Le traitement des maîtres a subi plusieurs changements forcés soit par le rang d'ancienneté, soit les mentions et les médailles obtenues.

    Les réparations nécessaires à la maison d'école sont si considérables qu'elles ne pourront être faîtes sans l'aide d'un secours.

    L'aspect est agréable et charmant mais la solidité est douteuse.

 

                                                   L'Institutrice,

                                                  Me de Laisus